… Aime poser les premiers mots du chapitre 3 de l’histoire de la Marine – Alexandre Couillon, ode au vivant.
En 1999, Alexandre Couillon et son épouse Céline faisaient le choix fou de reprendre le restaurant des parents d’Alexandre alors que, du haut de leur 22 ans, ils pensaient poursuivre leur apprentissage encore de longues années.
En 2007, ils obtiennent la première étoile. Dernière ponctuation du chapitre 1, elle est également le déclencheur d’une énorme vague de travaux qui donnera naissance à « la Marine » que nous connaissons aujourd’hui, mais aussi à l’ancienne Marine, désormais petit bistro du bord de mer et répondant au joli nom de « la Table d’Elise ».
En 2013, la nouvelle Marine obtient sa deuxième étoile et la notoriété d’Alexandre se propage bien au delà des frontières de la Vendée, de France et de Navarre. Le second chapitre est écrit, se terminant sur un tragique accident qui bien a failli couter sa main au Chef. Est-ce durant les longues heures de rééducation? Sont-ce les moments de doute et d’angoisse quand il ne réussissait plus à tenir le manche d’une casserole? Ou alors, plus positivement, est-ce la volonté de son ainée de faire à son tour une école de cuisine? Sans doute la conjonction de tout cela, et l’insatiable soif d’aller plus loin… Depuis le début de cette année, Alexandre et Céline écrivent le troisième chapitre de leur belle réussite.
Leur moteur? Il est double. Tout d’abord il y a eu des voyages et des rencontres qui ont piqué le couple d’une folle envie de s’occuper de l’amont, les produits. Le Chef n’a plus envie de n’être que le transformateur. Il veut connaitre les matières qui entrent dans sa cuisine, il veut les voir grandir, pour mieux les respecter et mieux les travailler… Côté végétal d’abord. Je ne pense pas me tromper en disant que la rencontre de San Degeimbre et de Benoit Blairvavq fut décisive. Disons qu’elle a titillé le Vendéen agriculteur, producteur de patates dans ses gênes, pour lui donner envie de remettre les mains dans la terre. Ni une ni deux, les Couillon cherchent et trouvent un terrain de plusieurs hectares à quelques pas du restaurant. Coup de pouce des dieux, ils trouveront en passant le jardinier fou qui va bien – mais nous en reparlerons bientôt… Côté mer ensuite. Là, ce fut la rencontre de Maître Okuda doublé d’un séjour en totale immersion au Japon qui a boulversé Alexandre : « J’ai pris conscience que je ne sais rien faire. »… Tempérons un peu. Mais il est certain que les quelques jours passés dans une cuisine seulement équipée de 2 feux, et le soin porté au poisson, ont remué les tripes. Alors sur ce terrain-là aussi, ni une ni deux, à son retour, Alexandre installe un vivier dans les coulisses du restaurant et entame une nouvelle collaboration avec les pêcheurs de Noirmoutier pour que le poisson arrive vivant aux portes du restaurant. A cela, il ajoute la maîtrise de la troublante méthode « ikejime », méthode consistant à tuer le poisson sans traumatiser ses chairs et sans le faire souffrir, même si le bain de sang qu’elle impose peut paraitre extrêmement cruel. Le résultat est là. Dans l’assiette.
Ce midi, Alexandre ne me cuisine pas le menu actuel de la Marine, non, ce midi, il se fait plaisir – et me fait plaisir – en alternant entre des plats qui ont marqué une de nos plus belles aventures, et d’autres où le Chef s’est retiré pour faire place à ce vivant tout nouveau qui donnera bientôt sa direction à la maison. « J’ai envie de disparaitre pour laisser toute la scène aux produits. Qu’ils s’expriment. Qu’ils nous guident. »… Comme si le cuisinier ne voulait plus cuisiner, mais n’être que le messager, ou le catalyseur entre ses hôtes et la nature de son île.
Les hôtes, parlons-en justement. Car ils sont le deuxième moteur de la transformation actuelle. Alexandre est toujours très reconnaissant envers ceux qui font la route jusqu’à eux. Il est vrai qu’un moment à La Marine, ça se mérite! Alors il souhaite rendre leur visite plus intense et tout faire pour les garder avec lui bien plus longtemps que celui d’un repas. Pour cela, de nombreuses nouveautés mijotent actuellement… Des cours de cuisine dans la partie cachée du restaurant, ouverte sur le jardin. Une table d’hôte pour les repas plus privés, dans la salle à manger où se cache la cheminée. Un salon pour vivre les premiers moments du repas ou pour faire durer le plaisir de l’instant café. Sans oublier des chambres. Dans quelques mois – il faudra encore être patient-, il sera en effet possible de venir passer une belle soirée à la Marine puis d’aller se coucher juste à côté pour, enfin, se réveiller au son des gréements des bateaux et petit-déjeuner avec vue sur le port de l’Herbaudière.
Des heures à « gratouiller » les premiers hectares de jardin, des heures à cogiter et dessiner le futur hôtel, des heures à voyager pour apprendre et apprendre encore, des heures à … et d’autres à cuisiner, car les 2 restaurants ne désemplissent pas. Et malgré cela, toujours une bien jolie famille épanouie, une équipe qui ne jure que par lui, et le temps de prendre le temps d’échanger, de raconter… et de faire le fou 😉
La Marine