… Aime AM, The Architect, The Mazzia
Alexandre Mazzia.
J’adore.
J’adore les prendre en photos. Tous. Les Chef(fe)s.
Je les trouve … beaux (belles) dans l’exercice de leur fonction.
Et en dehors aussi mais un(e) chef(fe) est rarement pas chef(fe) tant ce métier est prenant.
Récemment, j’ai vu passer un article expliquant les marqueurs de la cuisine d’Alexandre. Il y est question de piment, de brûlé / fumé, de tapioca, de torréfaction et d’épices. Tout cela est vrai, même si je n’ai pas vu une perle de tapioca ce jour mais, à la place, une formidable semoule.
Semoule / fleur d’oranger / topinambours, sur laquelle Alex vient verser une soupe de carapace folle !
Heureusement, un cuisinier qui utiliserait ces 5 produits et techniques ne saurait pas faire du AM.
Du coup j’ai passé ce déjeuner, outre à me prendre des claques, mais aussi à réfléchir à quel serait mon analyse de la cuisine d’Alex – sans en faire une vérité gravée dans la céramique, ni la réduire à cela.
Les épices, dont les piments, sont omniprésentes, tout comme le fumé/brûlé, les céréales et les fruits d’Afrique. Ce qui est surtout omniprésent à travers ces éléments, c’est l’enfance du Chef sur les terres congolaises. Alex ne me l’a jamais racontée, mais je l’imagine courant pieds nus et libre dans des grands espaces verdoyants et des herbes hautes. Pour moi, il habitait à l’ouest et respirait les embruns de la toute petite portion de côte Atlantique, à Pointe Noire… Si ça se trouve, ce sont ses années à Marseille qui ont développé son intérêt pour les coquillages, les crustacés et les poissons également très présents dans les assiettes… ce qui m’est surtout apparu plus particulièrement ce jour, c’est sa gestion très particulière des saveurs ; pas celle des goûts, mais bien celle des saveurs au sens acide, amer, salé, sucré et umami. J’avais noté ce trait de caractère culinaire à ma première visite (du temps du Ventre de l’Architecte). A l’époque, je m’étais dit, et lui avais dit, qu’il manquait de précision dans ses équilibres, et que le sel lui faisait peur. J’étais stupide… En fait, consciemment ou pas, Alex nous balade! Il joue avec nos papilles. Il les prend et les plonge dans un bain d’acide puis les douche d’une salinité marine avant de les réveiller par une injection pimentée. Il enchaine les déséquilibres en changeant de saveur majeure.
Même si, pour moi, le sel est encore parfois trop discret, je comprends. Non, pardon, il n’y a rien à comprendre en cuisine / Je voulais dire : j’ai appris à aimer et à apprécier la beauté de cette construction qui secoue. J’aime certains plats plus que d’autres, mais à chaque nouvelle étape du menu, il surprend, il signe d’une belle singularité, et souvent il épingle.
La première bouchée de cette balade fut « Pulpe de patate douce-réglisse /caviar impérial / algues cristallisées / katsobushi » (photo de droite – le petit chose à gauche). Parce que algue et caviar. Ce sont eux que je sens en premier avant d’être attrapée en plein surf sur mon plaisir iodé, par l’hyper sucré de la patate douce. Mon cerveau gauche s’est embrumé en envoyant un message ressemblant à « C’est quoi ce truc? Pourquoi une telle dose de sucre sur les algues et le caviar? »… puis le réglisse et le katsobushi sont venus à la rescousse et faire le lien pour donner la parole au cerveau droit qui me dit « Ferme-la, le cerveau gauche, arrête d’analyser et profite! », parce que ce fut vraiment bon, dès cette première dé-construction et durant toute la promenade… Tout cela avec une mini bouchée… Dingue !
Langouste / petits pois / betterave (et encore, je vous fais la version courte)
Juste le sucre de carcasse : c’est un de ces processus à la Loic Villemin, et qui vous fait penser « Respire mon pote!! » tandis qu’il déclame la préparation de cet élément, qui prend des heures… et ce n’est qu’un élément de l’assiette…
Des petits arrangements culinaires de Fada, Alex m’en a servis 21. 21 pépites aussi colorées visuellement que gustativement. Certaines sont des classiques toujours améliorés dont on ne saurait se passer, la biscotte végétale, le lait fumé aux œufs de poisson marinés au saké… D’autres sont des premiers rendez-vous, brioche tropézienne à la sardine, langouste/petits pois, … Et puis il a des souvenirs qui remontent à la surface, des clins d’œil tels que le miso aux coquilles d’huître ou le duo pistache/parmesan…
L’autre marqueur remarquable de la cuisine d’Alex, c’est lui en tant que chef-patron, avec dans son équipe un taux de fidélité et d’engagement que beaucoup de chefs peuvent lui envier. Certains l’accompagnent depuis 9 ou 10 ans. D’autres sont venus récemment rejoindre un nombre de collègues hors norme en ces temps où le recrutement est la bête noire des restaurateurs. A croire qu’il fait bon être au côté de ce Fada qui ne manque pas de me quitter en milieu d’après-midi, quand vient l’heure d’aller chercher son p’tit gars à l’école…
Alexandre MAZZIA, restaurant AM – Marseille
Toutes les photos de cette balade gourmande guidée par Alexandre Mazzia, sur Facebook