… Aime les légumes de Louise et Yannick – Brede réunionnais, une recette pour la souveraineté alimentaire?
C’est en parlant de plantes sauvages comestibles avec Sophie, que j’ai entendu parler du « brede« . Sophie est réunionnaise et elle explique qu’il n’y a pas un repas, sur son île, sans cette composante typique. Elle explique aussi que ce plat, le « brede », se cuisine à partir de feuilles de plantes comestibles. J’ai été intriguée. Rentrée à la maison, j’ai fait mes recherches. Dans le premier article trouvé, apparaissent les mots « stratégie de sécurité alimentaire ». Ca m’a convaincu de tester et partager cette recette.
Les bredes : On appelle ainsi les tiges et les feuilles des plantes comestibles. La plupart sont des tiges/feuilles de plantes cultivées telles que le chou, la chayotte (christophine) ou encore le manioc. Ca peut aussi être des tiges/feuilles de plantes sauvages telle que la « paillaterre », autrement dit l’amarante verte. Le brede chouchou désigne les tiges/feuilles de la chayotte ; le brede mafane évoque les tiges/feuilles de l’amarante ; le brede chou précise qu’il s’agit du chou chinois ou du pakchoy.
Le brede réunionnais : On utilise le même mot, « brede » pour désigner le plat traditionnel préparé avec ces tiges et ces feuilles. Il est très facile à réaliser, car il consiste simplement à poêler de l’oignon, de l’ail et les tiges et feuilles du brede choisi puis d’assaisonner la plupart du temps de piment, mais aussi parfois de gingembre. Il y a quelques recettes où est ajoutée de la tomate.
Si vous préparez un brede patate, alors vous préparez un brede aux feuilles de patate douce. Si vous préparez un brede chouchou, ce sera aux feuilles de christophine.
C’est à partir de là que je me suis dit qu’une version locale du brede s’imposait. Ca pourrait être un brede blette mais aussi, pourquoi pas, un brede ortie !
A noter qu’il existe aussi le bouillon de brede qui consiste à réaliser la même recette mais en y ajoutant de l’eau à la fin (et de cuire quelques minutes) pour obtenir le bouillon.
Pourquoi le brede en tant que plat traditionnel et quotidien joue-t-il un rôle dans la sécurité alimentaire de cette île ? Pour 2 raisons.
La première est que le brede est un plat extrêmement sain. Les feuilles de plante comestible sont riches en nutriments, en minéraux, et en fibres. Ainsi, consommées quotidiennement, elles assurent l’apport journalier de ces éléments à l’ensemble de la population (une population dont la bonne santé est assurée par des légumes locaux est une population plus résiliente).
De plus, les bredes sont faciles à cultiver et poussent partout donc elles permettaient aux petits paysans de s’assurer un complément de revenu, ou aux familles de s’assurer un minimum alimentaire. Imaginez, chez nous ! Si on se mettait à consommer les feuilles de patate douce, les feuilles de citrouille ? Ca ferait une belle quantité de nourriture locale supplémentaire. A cela vous ajoutez que ce plat peut se préparer avec des plantes sauvages comestibles alors on ferait un grand pas en avant vers plus de résilience alimentaire.
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Sur ce, je suis allée, comme chaque semaine, chercher mes légumes chez Louise et Yannick.
Ce ne sont pas des légumes,
ce sont des œuvres d’art !
Entre autres, je rapporte des magnifiques côtes de blette si fraîches que le blanc claque comme du verre quand on le casse ! Les radis sont d’une rondeur et d’une couleur de joyau. Les carottes sentent encore bon la terre humide d’où elles sont sorties quelques heures plus tôt. C’est sublime… Et il y a ce vert. Beaucoup de vert. Vert des radis et vert des carottes. En temps normal, les feuilles de radis iraient dans un potage tandis que les feuilles de carotte iraient au potager via le compost. Mais pas cette fois ! Aujourd’hui, je teste le brede local à base du vert des blettes, des feuilles de radis et des feuilles de carotte.
Le brede réunionnais aux verdures d’ici
Pour 3 personnes
Préparation : 20 minutes
Cuisson : 15 minutes ; wok (ou poêle ou sauteuse ou …)
Plateau des ingrédients avec oignon, ail, gingembre, et beaucoup de vert
- 220 gr de vert de blette
- 220 gr de feuilles de radis (2 bottes)
- 60 gr de feuilles de carottes (1 botte)
- 1 à 2 oignons selon leur taille
- 4 gousses d’ail
- Un peu de piment si vous aimez ça
- 1 cm de gingembre frais (ou 1 càc de gingembre en poudre)
- Sel, poivre
- 1 filet d’huile de cuisson
Pour cette recette : j’ai gardé 100% des tiges de radis qui sont très tendres ; j’ai mis de côté le blanc des blettes pour une autre recette ; j’ai retiré la majeur partie des tiges de carottes, car elles sont très dures.
Laver les bredes (ie les feuilles et leurs tiges). Couper les feuilles de blette (les feuilles de radis et de carotte n’ont pas besoin d’être coupées).
Peler et émincer l’oignon.
Peler et hacher l’ail.
Râper le gingembre ou le tailler finement si pas de râpe adaptée.
Dans le wok, faire chauffer un généreux filet d’huile (elle aide à fixer les vitamines A des bredes). Ajouter l’ail, l’oignon et le gingembre. Cuire sur feu moyen-doux sans trop remuer. Si ça colore trop rapidement, ajouter de l’eau de temps en temps.
Ajouter les feuilles de blette, radis et carotte en plusieurs fois. Saler et poivrer – Ne salez pas trop, car le volume des feuilles va fortement réduire et vous pourriez vous retrouver avec une préparation trop salée. Cuire jusqu’à ce que les feuilles soient attendries et aient rendu leur eau.
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Ce qui est bien avec cette recette, c’est que vous pouvez tout adapter ! Vous pouvez mettre plus d’oignon. Vous pouvez oublier l’ail si vous n’aimez pas. Vous pouvez remplacer le gingembre par une autre épice plus à votre goût.
Vous pouvez y ajouter des graines ou des fruits secs aussi. Vous pouvez ajouter des dés de tofu ou des lardons… Bref, vous faites ce que vous aimez.
Oignon, ail et gingembre dans le wok
Les mêmes, compotés
Avec les bredes blette, bredes radis et bredes carottes
Une astuce que je partage ci-après
Mon premier mais sûrement par dernier brede
décoré de fleurs de ciboulette
Mon astuce en plus : Je cuisine énormément au wok, surtout dès qu’il s’agit de faire sauter des légumes. Il permet l’astuce suivante :
Quand les légumes sont bien tendres et compotés, les pousser sur le bord du wok. Ils ne seront pas surcuits mais resteront au chaud. Le petit jus va rester dans le fond du wok.
A ce petit jus, ajouter une càc généreuse de miel (photo précédente) et laisser cuire jusqu’à ce que le petit jus caramélise légèrement.
Faire redescendre les légumes dans ce jus trop bon car caramélisé et chargé de tous les arômes des légumes. Mélanger, débarrasser dans le plat de service et déguster.
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Le brede réunionnais est traditionnellement servi avec du riz. Si vous ajoutez à côté un rougail, alors vous êtes bien. Pour moi, mon premier brede a été additionné d’un peu de beurre de cacahuètes (hiiiiii…..) et servi mêlé à des nouilles de riz. A côté, quelques pois chiche en salade pour composer un menu gourmand, végétarien et parfaitement équilibré.
Le brede sous tous les angles
Jus de cuisson restant dans le wok
Un dernier mot anti-gaspi : si il reste un peu de jus de cuisson dans le wok, surtout, ne le jetez pas !! Il est un incroyable concentré de saveurs ! Ajoutez-le au riz qui accompagne le brede réunionnais.
Delaire
30 avril 2023 @ 8:41 am
C’est tun régal de te lire Fanie, ton approche est très pro et tu as bien saisie les Us et coutumes des Réunionnais.
Merci pour ce bel article qui nous permet plus de résilience.
Anecdote : j’ai préparé des brèdes fanes de radis à Yaya un jour ou j’étais à la bardoniére. La première fois ça peu surprendre !!
Stéphanie BITEAU
30 avril 2023 @ 6:16 pm
Merci pour ton commentaire! Je trouve ça tellement magique de pouvoir cuisiner facilement, toutes ces verdures! J’espère qu’un jour tu me cuisineras un brede payaterre !